mercredi 17 novembre 2021
Tous les événements indiqués dans l'horaire sont à l'heure de l'Est. Inscription requise.
9h00
Présentation et ouverture du colloque
9h15
Conférence plénière : « Éprouver les frontières audiovisuelles : (com)poser les limites, penser les gestes de création »
Présidence: Frédéric Dallaire, professeur adjoint de cinéma, Université de Montréal
Dans un contexte de recherche-création, la frontière est un espace plutôt qu’une ligne, c’est un lieu que l’on traverse, que l’on éprouve. Cette zone interstitielle a pour fonction de relier en désignant une limite, d’interroger les relations entre la théorie et la pratique, entre le son et l’image, entre l’art et la vie quotidienne. Ainsi, les frontières que l’on (com)pose permettent d’arpenter de nouveaux territoires et de faire bifurquer nos gestes de création. Cette conférence étudiera la dynamique relationnelle de la frontière à l’aide d’un remixage d’images, de paysages sonores et de paroles de théoriciens. Et si le cinéma nous aidait à comprendre les redéfinitions contemporaines de nos frontières politiques, identitaires, sociales, disciplinaires et artistiques ?
10h00
Période de questions
10h20
Pause
10h30
Panel 1 : Les frontières du genre
Présidence: Sylvain Lavallée, comité scientifique
Ce panel propose de réfléchir la frontière à partir de la notion du genre, dans plusieurs champs artistiques (littérature, cinéma, séries télévisées). Il sera l’occasion de questionner diverses normes, notamment identitaires, nationales, que les approches féministes viennent bousculer, et en même temps de penser les frontières du genre lui-même. À partir de cet angle, ce panel discute de censure et de traduction, du cinéma des femmes au Québec, et de la circulation des divers types de gaze (male, female, queer, etc.) au sein d’une même œuvre.
Frontières et identité sexuelle : l’aventure éditoriale du Journal du voleur de Jean Genet
Cette communication se propose d’étudier les frontières traversées par le Journal du voleur de Jean Genet lors de son parcours éditorial et interculturel. Le récit de Genet, qui transgresse les frontières des genres, est édité clandestinement à Genève en 1948. En 1949 le Journal, publié aux éditions Gallimard connaît la consécration mais à la condition que l’auteur s’autocensure, les modifications révélant les frontières de la bienséance littéraire. La première traduction chinoise en Chine (1992), fondée sur l’édition Gallimard déjà expurgée, censure de nouveau le texte genetien, pour des raisons culturelles et politiques. La seconde traduction (1994) vient brouiller les frontières. Publiée à Taiwan, elle part de la version anglaise (1965) dont la source est l’œuvre originale, éclipsée en France. À ces sources distinctes s’ajoute les différences linguistique et axiologique entre les deux sociétés sinophones. Les péripéties de l’édition et des traductions du Journal montrent ainsi les frontières complexes entre création, traduction et censure sur la question du genre.
Expanding the Boundaries of Women’s Cinema in Quebec: Antigone (Sophie Deraspe, 2019)
and Une Colonie (Geneviève Dulude-De Celles, 2019)
Since the 1970s, women filmmakers have articulated a strong critique of nationalist rhetoric, drawing the attention on the intimate to affirm alternatives spaces and relations to the political sphere (Carrière 1983, Nadeau 1999). Recently, a new generation of women filmmakers have contributed to the reconfiguration of Quebec cinema’s national, cultural, and political concerns. This presentation focuses on two filmmakers, Geneviève Dulude-De Celles, and Sophie Deraspes that are contributing to the formation of a renewed feminist film culture in Quebec. In particular, their respective films Antigone (2019) and Une Colonie (2019) widely circulated within the international film festival circuit. These films foreground “eccentric subjects” (de Lauretis 1990) and display narratives of migrations, displacement, and borders. Situating Antigone and Une Colonie in continuity with the tradition of women’s cinema in Quebec and internationally, I argue that Deraspe and Dulude-De Celles counter established cinematic conventions and normative understandings of politics and the nation, and expand the specific mandate of women’s cinema to address femininities within and beyond the boundaries of national or cultural identity.
Male, Female, Queer, Ciset Trans Gazes : De la porosité des regards dans la série télévisée
contemporaine
Depuis les écrits de Laura Mulvey en 1975 les études sur le genre sont parvenues depuis plusieurs années à complexifier la notion des regards (gazes) dans nos représentations culturelles et médiatiques. Ainsi, il n’est pas seulement question, pour Iris Brey, d’établir une simple démarcation entre male et female gaze puisqu’il est entendu que ces différents regards ne sont pas strictement binaires et opposables. L’analyse cinématographique prouve qu’il est souvent très facile de passer de l’un à l’autre au sein d’une même œuvre. Plus encore, ces poreuses frontières des genres nous amènent à voir apparaître de nouveaux paradigmes qui sont autant de nouvelles façons de penser le geste cinématographique et nos représentations culturelles des corps et des identités : Iris Brey défend ainsi l’existence d’un male gaze queer et Charlie Fabre celui d’un cis gaze (et donc en creux son pendant, le trans gaze). J’entends avec cette communication tenter de préciser à travers des exemples précis et contemporains comment plusieurs séries télévisées s’interrogent sur les représentations genrées et leur déconstruction en démultipliant les types de regards au sein de leurs épisodes.
11h35
Période de questions
11h55
Pause dîner
13h25
Panel 2 : Dépasser les frontières méthodologiques en histoire de l’art
Présidence: Denis Ribouillault, professeur agrégé d’histoire de l’art, Université de Montréal
Ce panel propose de discuter, à travers l’analyse de diverses œuvres, les frontières méthodologiques et théoriques en histoire de l’art selon une approche interdisciplinaire enrichie par l’anthropologie, l’intermédialité ainsi que l’histoire culturelle et sociale. Les présentations proposent une analyse renouvelée d’objets artistiques allant de trois millions d’années avant notre ère aux XVe et XVIIe siècles. Elles questionnent les origines de l’art, mais aussi les échanges artistiques au-delà des frontières culturelles, géographiques et temporelles.
The Readymade as Origin and End
My talk is premised on the following observation: that the quasi-teleological march painting appeared to undertake between the years of 1860 and 1960 sees its symmetric historical double in paleolithic art historiography. Where painters took up as problems the historical conventions of the painting medium in order to convey art content in progressively simpler, more unadorned or abstract forms, art historians of prehistory move progressively backwards in time, mobilizing more conventional works of paleolithic art to help see in older, less elaborate, and more abstract objects a kind of embryonic artness. Looming over the history of modern painting is Duchamp’s readymade. It was the widespread acceptance of the readymade as a possible candidate for the status of art object that brought renewed tidings of art having reached an end of sorts. In my talk, I argue that the readymade’s place on the art historical record forces us to confront not only art’s purported end, but also its putative origins—and everything in between.
Organs of God: A Gaze into the Anatomized Body-Interior
Anatomical theaters captured the morbid imagination of early modern Europeans. They existed on the borders of society, polluted by dissection but enlightened by the pursuit of scientific knowledge. Within their walls and astride their anatomy tables, an antithetical sprouted, one which had already taken root in early modern society. It was an antithetical of insides and outsides, centered around the transgression of boundaries between them. Who could move between an inside and an outside? And what was the cost? Rembrandt van Rijn provided an answer to these questions posed by an early modern social corpus in two group portraits for the Guild of Surgeons of Amsterdam. The Anatomy Lesson of Dr. Nicolaes Tulp and Anatomy Lesson of Dr. Deijman did not shy away from the gruesomeness of gore and decay present in the theater, instead their pollutive qualities were localized, transformed. Rembrandt gathered the world of borders and transgressions in which he lived, and gave them a face: stiff and pale in death.
Depicting Two ‘Buddhas:’ Artistic Intersectionality between the Crowned Buddha and Hans Schilling’s Manuscript of Barlaam and Josaphat
Since the 1990s, Renaissance study has been reorganized and expanded to analyze how nonEuropean influences have played a role in shaping European visual art. By reexamining this connection from religious and trade efforts, often previously overlooked Khmer influence on Renaissance literature and art can be seen. Figure 2 represents the case study of the Crowned Buddha from the Angkor period and the German Christian illuminated manuscript by a Follower of Hans Schilling, Barlaam and Josaphat (1469). This figure explores connectivity through similar elements of storyline and artistic iconography. By drawing connections between these two works, current Renaissance studies will be reframed by acknowledging the role of world religions and cultures in impacting artistic choices during the German Renaissance. Ultimately, by acknowledging Cambodian Buddhist influence on 1 the German Christian manuscript of Barlaam and Josaphat, cultural and religious agency is restored to the true Khmer influencers of the Renaissance.
14h30
Période de questions
14h50
Pause
15h00
Panel 3 : Art & journalisme
Présidence: Sylvain Lavallée, comité scientifique
Ce panel propose de penser les frontières de l’art et du journalisme. Il abordera la création d’œuvres s’appuyant sur des archives, le journalisme de données, pour se questionner sur la place que peut prendre l’art dans des démarches contestataires, ou pour soulever des problématiques sociopolitiques. La notion de frontière sera aussi explorée à partir du langage du journalisme, dans un angle réflexif, pour étudier son discours à propos de la migration.
Between the Lines of Revolution: Boundaries of Art in Protest in Post-Uprising Minneapolis
The Twin Cities has stood witness to a year of violence against Black bodies like no other in the wake of not only George Floyd’s murder on May 25, 2020. In response, people took to the streets to create a visual record of the movement through radical art. In our praxis, archival work is not simply an academic exercise; it serves as a form of protest. By taking the ephemeral and making it permanent, it has been possible to record the legacy of the movement in a manner which no others in the nation would be able to replicate – but within that process, boundaries have been established, challenged, and shifted immensely through each project. We consider: How do the boundaries of the political intersect with the visual?
Au confluent des arts visuels et du journalisme de données
La forme artistique de l’enquête et la pluralité d’appropriation qui la compose à toujours mobilisée de nombreux artistes. Mais à l’ère du numérique, l’exploration des données massives couvre de nouveaux territoires d'enquêtes. Nans Bortuzzo utilise le « Big Data » comme matériel artistique et son champ de recherche-création se situe à la frontière disciplinaire entre le journalisme de données et les arts visuels. Il utilise un procédé d'accumulation, d'analyse et d'organisation qui s'inscrit dans le « process-oriented art » selon une perspective documentaire et journalistique. Il collecte et analyse de grands ensembles de données qui proviennent de la recherche académique, des réseaux sociaux ou des données publiques et mène ensuite un travail d’investigation à l'aide d'outils et de méthodologie spécifique au « Data journalist ». Il s'agit de faire parler les données pour révéler une réalité qui va ensuite servir de base conceptuelle dans une production artistique.
« Breaking the frame » : réflexions axiologiques à la frontière de la profession journalistique
Ce que nous savons de la migration, des trajectoires humaines qui la composent, de l’intégration des immigrants et de notre possibilité de vivre ensemble est étroitement lié à des représentations médiatiques, qui sont le produit du travail de journalistes plus ou moins spécialistes de ces questions. Cette présentation consistera en l'exploration de la notion de frontière dans le cadre théorique de la littérature sur la professionnalisation en communication organisationnelle et en sociologie du travail, le rôle du discours métajournalistique dans ce processus et l'application de ces conceptualisations à l'exemple d'un guide pratique composé par le European Journalism Centre en 2021. En collaboration avec des universitaires et des professionnels, notamment des journalistes en situation d'exil, cette initiative se situe à la frontière entre le journalisme professionnel et la recherche en science sociales et donnent une illustration frappante des manières par lesquelles la professionnalisation d'un journalisme spécialisé se produit au sein et au-delà des limites de cette profession.
16h05
Période de questions
jeudi 18 novembre 2021
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9h10
Conférence liminaire : « Le jeu vidéo comme avatar du « big crunch » numérique : trajectoires et généalogies artistiques d’un méta-média »
Présidence: Dominic Arsenault, professeur agrégé de jeu vidéo, Université de Montréal
Le jeu vidéo comme avatar du « big crunch » numérique : trajectoires et généalogies artistiques d’un métamédia. On compare souvent le jeu vidéo au cinéma: voilà deux objets audiovisuels produits dans un contexte « d’art industriel ». Mais le cinéma n’est qu’une des lignées dans lesquelles on peut inscrire le jeu vidéo. Je présenterai plusieurs des généalogies du jeu vidéo, y compris ses trajectoires esquissées mais peu explorées, minorisées ou invisibilisées aujourd’hui. Se succèderont les passages historiques et médiatiques (fiction textuelle, littérature électronique, cinéma interactif), les échanges culturels (exposition muséologique, reconstitution historique), et les frontières et absorptions artistiques (arts visuels, musique, animation). Par ce tour d’horizon je montrerai que le jeu vidéo constitue un avatar du numérique et de son abolition des frontières qui nous mènera au « big crunch ».
10h00
Période de questions
10h20
Pause
10h30
Panel 4 : La représentation et la construction identitaires
Présidence: Cassandre Herbert, comité scientifique
Le panel appréhende la frontière identitaire à partir d’une perspective épistémologique. Il propose d’explorer la question de l’entre-deux (pays, lieux, langues et cultures) en s’attardant sur les enjeux d’identité et de représentation. À travers l’expérience de la migration et de la confrontation à l’étranger, autre à soi, il propose de mettre de l’avant divers expériences migratoires illustrées par le biais du témoignage littéraire, historique et filmique.
Le pas suspendu de la cigogne : combien de frontières devons-nous franchir avant de rentrer chez nous ?
Dans une séquence du film Le pas suspendu de la cigogne de Théo Angelopoulos, une frontière sépare des mariés par une rivière. On assiste à leur mariage, chacun sur leur rive. Les familles doivent se cacher afin de ne pas être arrêter par l’armée. Et c’est là l’un des points critiques de Angelopoulos envers le politique grec : tous ces gens sont chez eux. Ce sont les frontières qui les excluent. De la multitude des frontières qui ont été redéfinies à travers les guerres qui ont sévies dans les Balkans, il en résulte que les membres d’une même famille ont été séparés. L’étranger est un membre de la famille. Malgré les frontières, nous sommes tous interreliés. L’Autre doit donc être considéré ainsi, un membre de la famille. « L’âme aussi, si elle veut se reconnaître devra se regarder dans une âme » (Platon Alcibiade 133b).
Louis-François Lejeune et l’Égypte, frontières culturelles et épistémologiques
Dans les trois peintures de bataille (1804-1806) que le peintre et soldat Louis-François Lejeune a faites de la campagne de Napoléon en Égypte (1798-1799), les frontières politiques de la représentation d’une bataille se multiplient. Les frontières culturelles visibles dans la façon de se comporter sur le champ de bataille évoquent d’abord des frontières idéologiques qui attestent d’un orientalisme naissant. Au-delà, il y a aussi frontière épistémologique entre témoignage historique et son rendu en images. Or, cette question de témoignage est un enjeu des représentations de Lejeune, lui qui est surtout connu pour représenter les batailles auxquelles il a participé en tant que soldat. Puisque Lejeune n’était cependant pas en Égypte, la frontière géographique n’est franchie ici qu’en images. Grâce à ces trois tableaux, Lejeune franchit ainsi les frontières politiques, idéologiques et culturelles que ces affrontements militaires impliquent, permettant une réflexion sur l’établissement d’une connaissance historique à partir de la représentation « d’après nature ».
La notion de frontière et la question de l’entre-deux dans Le bleu des abeilles de Laura Alcoba
Cette proposition s’intéressera à l’œuvre de Laura Alcoba, Le Bleu des abeilles (2013). La place que la notion de frontière joue au cœur de la littérature migrante sera traitée, notamment à travers le personnage de la fillette qui permet de penser l’étranger, lui qui, en tant qu’immigré, refugié, exilé ou déplacé est porteur d’un discours autre. Le regard de l’enfant dans Le Bleu des abeilles invite à réfléchir à la notion de frontière et à l’importance que l’étranger accorde à la langue dans sa quête identitaire. L’analyse sur les images que les frontières évoquent dans Le Bleu des abeilles amènera à méditer autour de l’entre-deux propre à la littérature migrante et qui est à la fois un entre-deux mondes, deux temps, deux langues dotées de significations différentes, autant d’entre-deux qui font ressortir les déchirements intérieurs en proie auxquels est le sujet migrant qui oscille entre l’exclusion et l’acceptation.
11h35
Période de questions
11h55
Pause dîner
13h25
Panel 5 : Interroger les frontières de l’humain dans les arts
Présidence: Livia Monnet, professeure agrégée de littérature comparée, Université de Montréal
La notion de frontière désigne un ensemble de réalités qui ont été créées et organisées par les sociétés humaines. Il s’agira pour ce panel d’interroger et de discuter ces constructions grâce à l’analyse de divers corpus qui viennent brouiller les limites des frontières ontologiques. Il en découle une riche réflexion sur les notions d’individu, d’espèce et de création.
Subversion, évasion : paysages et animaux du Post-exotisme
Mon étude portera sur les paysages poétiques présents dans le post-exotique, un courant littéraire fictionnel inventé par l’auteur français Antoine Volodine (1950-). Je tenterai d’analyser la mise en place des systèmes d’enfermement et de contrôle des corps à l’intérieur de cet univers et les techniques utilisées par les personnages enfermés pour franchir les frontières (ambiguës) de leurs murs. Pour cela, il s’agira de comprendre la constitution des « paysages » post-exotiques (souvent déserts) et la place matricielle de la « cellule » dans cet univers. Nous tenterons ensuite de percevoir les rapports entretenus avec les animaux par le « peuple » post-exotique. Ces rapports ne cesse de transgresser l’appartenance de ce peuple à l’humanité comprise en tant qu’espèce. Ce dépassement est-il le dernier signe d’une émancipation politique ? Il s’agira de construire mon développement en gardant à l’esprit que le post-exotisme se construit comme univers virtuel en conflictualité avec le monde actuel. Les frontières entre la réalité et le rêve, la vie et la mort, la virtualité et l’actualité ne cessent en effet d'être rendues confuses par l’auteur et les narrateur.ices.
L’effritement des frontières dans les littératures autochtones : penser une théorie de la trans-ontologie
En 2012, lorsque Chadwick Allen propose une études des littératures qui est « Trans-Indigenous » plutôt que transnationale, il refuse surtout une analyse basée sur la conception occidentale de « nations » : « Trans-, yes, in the sense of across, beyond, and through, but not limited to national borders, and certainly not limited to the national borders of contemporary (settler) nation-states ». Plus précisément, c’est la catégorie épistémologique occidentale de « frontières » que l’auteur remet en question, un processus qu’on retrouve également dans les littératures autochtones lorsque les représentations animales, végétales, minérales, astrales et oniriques viennent perturber la notion occidentale de personne. En effet, la présence d’acteurs autres qu’humains permet de repenser l’étanchéité des catégories d’êtres que la cosmologie occidentale maintient férocement. Mais que se passe-t-il lorsque les frontières entre les êtres s’effritent? Sont-elles remplacées, et si oui, par quoi? Afin de répondre à ces questions, je propose d’aborder l’effritement des frontières ontologiques occidentales dans l’œuvre de Virginia Pésémapéo Bordeleau (Métisse Crie), soit Ourse bleue (2007) et L’amant du lac (2013).
L’art techno-animiste. Quand les catégories réel et virtuel n’ont plus de sens
Mes recherches cherchent à aborder un phénomène désigné comme techno-animisme, qui correspond à la création de quasi-objets auxquels est attribuée une « âme » ou un principe d'animation. Plus précisément, cette recherche est axée autour des pratiques artistiques contemporaines, qui mettent en scène les diverses « formes de vie » et cherche à explorer les modalités de la coexistence entre les humains et non-humains, en particulier avec les machines. J’analyse la notion de l’espace-limite et de l’expérience-limite que nous retrouvons dans les expositions d’art techno-animistes. Je cherche à comprendre par quoi s’exprime cette Limite et est-ce que l’exposition dans son ensemble peut être perçue comme situation-limite et/ou expérience-limite, où la personnification des objets s’opère? Est-ce que la Limite c’est ce qui rend l’espace d’exposition une « sphère habitée » ? Où est la frontière entre vivant/non vivant et organique/technologique, réel/virtuel dans le techno-animisme? Je souhaite présenter la Limite en faisant l’approche comparative de l’art contemporain, notamment la création de Mark Leckey et je propose de voir l’exposition comme un sphère « vivant » où le médium et le mécanisme d’animation convoquent une présence.
14h30
Période de questions
14h50
Pause
15h00
Panel 6 : Aux frontières de la matérialité
Présidence: Olivier Asselin, professeur titulaire de cinéma, Université de Montréal
Ce panel nous invite aux frontières de la matière, à l’aune de son immatérialité potentielle. Que ce soit à travers des objets d’étude « immatériels » (digital arts/média), en analysant la relation (intangible) entre le corps scénique et la matière, ou en photographiant l’imperceptible (la matière invisible), ces trois interventions bousculent notre conception première de la matérialité et dessinent des voies de réflexion et d’interprétation qui en permettent une relecture. S’appuyer sur la matière des médiums employés pour rendre compte d’expériences, de réalités impalpables, c’est aussi de cette exploration dont il est question.
The Immaterial Materiality of Media Arts
How do we engage ethically with the other in virtual space and how do the materials of the digital work enable and constrain these relationships? We often think of media arts as immaterial, but to fully understand the medium we must thoughtfully consider the ways that materials interact within these works, the physical hardware of the media, the software and code needed to create the work, and the real world materials that are references within the visual field. The relationship between the physical world and the world presented within the visual aspects of media arts causes us to consider how we can engage with these materials ethically. Do our interactions with materials in the digital realm affect our interactions in the physical world? If so, what must we consider while making and viewing media arts?
Le corps n’est pas une enveloppe : dynamique d’agencements et de métamorphoses d’une corporéité plastique sur la scène
Ma communication prend pour appui le concept de corporéité pour questionner le potentiel de la relation interartistique entre la scène et le plastique. Comment l’utilisation de matières plastiques dans la création scénique pourrait permettre de rendre perceptibles les agencements et les liens rhizomatiques qui s’établissent entre les corps présents sur la scène, de manière à engager des processus de transformation, des métamorphoses, des devenirs? La corporéité suppose un corps sans frontières, un corps sans organes. De quelle manière la matière affecte ce corps poreux et instable de l’interprète et vice-versa, et surtout, quelles forces invisibles ce dialogue marqué par la plasticité rend-il perceptible au spectateur? Cette communication explorera donc les assises philosophiques soulevées par cette question, mises en lien avec la préparation des explorations pratiques que je me propose de réaliser à partir de l’hiver 2022.
Radioactive Photography and the Poignant Transgression of Materiality’s Boundaries
In this presentation, the work of four contemporary artists who have used the medium of photography to capture radioactivity will be analyzed. By reinventing photographic ways to represent the soil and landscapes of a post-3.11 Fukushima and of uranium mining and nuclear waste sites in the United States, these artists have devised ways to materialize an imperceptible radioactive threat; they have proposed a powerful mediatic alternative to a strictly visual rendering of information about nuclear landscapes, and have thus managed to transgress materiality’s boundaries. This presentation’s thesis is that materialized information, such as that vibrating in the photographs taken as case-studies, which are capturing and releasing radiation, is a powerful mediatic alternative to a strictly visual rendering of information. Building on Barthes’ notion of the punctum, it will be argued that the transgressed materiality of these radioactive photographs has the potential to cause affective, embodied responses in beholders by disturbing their bodily integrity – the material frontier of their very being.
16h05
Période de questions
vendredi 19 novembre 2021
Tous les événements indiqués dans l'horaire sont à l'heure de l'Est. Inscription requise.
9h10
Conférence liminaire : « Les approches numériques de l’étude de l’art et de l’architecture médiévaux : Reconstitutions 3D et bases de données »
Présidence: Kristine Tanton, professeure adjointe d’histoire de l’art, Université de Montréal
En raison des preuves fragmentaires dont disposent les historiens de l’art médiéval, la technologie numérique a la capacité non seulement d’élargir notre corpus, mais aussi de présenter de nouvelles occasions de recherche multidisciplinaire et de redéfinir les approches traditionnelles. Surtout, les méthodes numériques permettent aux historiens de l’art de produire de nouvelles connaissances en mettant en évidence des modèles esthétiques et culturels qui n’étaient pas visibles auparavant. Dans ma présentation, j’expliquerai la manière dont j’intègre des bases de données et des modèles numériques 3D de monuments disparus pour examiner les relations dynamiques entre la sculpture, l’architecture et la performance rituelle aux XIe et XIIe siècles. Cela m’a permis d’envisager de nouvelles approches de l’analyse iconographique qui incluent une compréhension spatiale et expérientielle de la sculpture et de l’architecture médiévales. Cette nouvelle approche de l’iconographie intègre la relation structurante et complexe des thèmes multiples que l’on trouve dans les images médiévales et les manières inventives dont l’art s’inscrit dans son contexte historique précisément parce qu’il joue un rôle actif dans des interactions sociales.
10h00
Période de questions
10h20
Pause
10h30
Panel 7 : Explorer les frontières du « récit » de soi
Présidence: Cécile Delignou, comité scientifique
Ce panel présente une analyse et une réflexion autour du récit de soi, du sujet. S’exerçant aux frontières poreuses de différentes disciplines ou méthodes, ces trois communications cherchent à expliciter diverses formes de « discours », passant par l’écrit, par le corps ou par le ludisme. Cette rencontre engendre des compréhensions et des conceptions singulières des objets étudiés ainsi que des disciplines engagées.
Brouiller les frontières disciplinaires et méthodologiques : écriture et recherche historique chez Saidiya Hartman
Le travail de la chercheuse et écrivaine US-américaine Saidiya Hartman (Columbia University) s’articule autour de tensions et de glissements entre frontières de différentes natures. Son texte Lose Your Mother : A Journey Along the Atlantic Slave Route, (Farrar, Straus And Giroux, 2007), explore l’histoire de l’esclavage et ses répercussions contemporaines dans l’expérience des afro-américain·e·s. Hartman y combine une approche qui emprunte aussi bien à la recherche historique et archivistique qu’à la théorie et à la fiction narrative. Cette communication aura pour but d’analyser l’approche d’Hartman afin de voir comment son travail autour et au-delà des frontières disciplinaires, méthodologiques et temporelles lui permet de concevoir une vision de l’histoire de l’esclavage qui est à la fois nourrie par des enjeux historiques et politiques ainsi que des constats personnels. Nous serons sensibles à la manière dont cette approche amène ultimement l’autrice à développer une réflexion multidimensionnelle et irréductible sur l’histoire et l’identité des afro-américain·e·s.
La danse documentaire
Au travers de la « danse documentaire », je souhaite interroger voire renouveler l’imaginaire cinématographique portant sur des violences intra-humaines. Pour ce faire, j’ai élaboré un corpus filmique où chaque film documentaire entretient un certain rapport à la musique, à la poésie et à la danse comme moyen narratologique et « d’empowerment » d’expériences minoritaires. Ces documentaires s’attachent à représenter la capacité d’agir des protagonistes sur des violences vécues et portent une attention spécifique au mouvement des corps. Il sera question de la corporéité de l'image et du « tournant corporel dans les études cinématographiques ». (L. Jullier) La « danse documentaire » me permet d’alimenter ma réflexion et ma pratique artistique sur : comment l’emploie des arts performatifs dans le cinéma documentaire permettrait-il d’éviter un réveil de la mémoire traumatique des protagonistes qui témoignent de violences ?
Entre réel et fiction : singularités et enjeux du jeu vidéo autofictionnel comme pratique expressive émergente
Si dans le cadre des études littéraires et cinématographiques l’autofiction constitue à la fois une notion et un thème relativement bien ancrés, il en est tout autre dans le cas des jeux vidéo. En effet, encore peu présents dans le paysage vidéoludique et, par conséquent, encore peu étudiés, les jeux vidéo autofictionnels représentent une pratique expressive émergente – une forme d’expression autobiographique singulière. Considéré globalement comme des « jeux expressifs », ce type particulier de production aborde de manière générale des sujets ainsi que des thématiques jugés plus « sérieuses » (ex. : la maladie, la mort, etc.) et, par extension, plus difficilement « ludifiables ». Dans cette optique, l’objectif de cette communication est de mettre en lumière, dans un premier temps, le contexte et les conditions ayant permis l’émergence des autofictions vidéoludiques et, dans un second temps, les défis ainsi que les enjeux que ces derniers suscitent au niveau du design de jeu en présentant des exemples concrets.
11h35
Période de questions
11h55
Pause dîner
13h30
Panel 8 : La programmation « Frontière » du centre de création numérique TOPO
Présidence: Eva Quintas, artiste, responsable du comité artistique de TOPO et directrice générale du centre collégial de recherche ARTENSO
Ce panel, animé par Eva Quintas, cofondatrice de TOPO, présente la programmation FRONTIÈRE à travers ses trois cycles d’expositions auxquels ont été associées trois autrices : Nuria Carton de Grammont, Paule Mackrous et Mirna Boyadjian. Les 10 artistes qui y participent, issu.e.s de la pluralité des Amériques, abordent des thèmes tels la reconquête des racines et des héritages ; les technologies et leur capacité de brouiller les frontières entre le documentaire et la fiction, le vivant et le non-vivant ; les relations entre la géographie et le sociopolitique, qui interrogent de diverses façons les rapports de pouvoir dans l’espace. En conclusion, Michel Lefebvre, directeur général de TOPO, abordera les défis d’une programmation ayant dû basculer en ligne pour son dernier cycle, traversant ainsi une ultime frontière.
Cultures, langages et spiritualités : au-delà des frontières
Le célèbre anthropologue de récits chamaniques Carlos Castaneda déclarait que « ce qu’il nous faut faire pour permettre à la magie de s’emparer de nous, c’est chasser les doutes de notre esprit. Une fois que les doutes ont disparu, tout est possible ». Dans un monde confiné par la capitalisation des ressources (économiques, sociales, écologiques), l’art contemporain propose de traverser les confins de la spiritualité, entendue d’abord comme l’accroissement de la conscience au-delà de la matérialité de l’objet artistique. Mais en débordant de l’expérience esthétique du sublime, il s’agit également de repenser la spiritualité comme une ressource de transformation sociale : un « activisme spirituel » qui propose un bouleversement collectif à partir d’une vision holistique et relationnelle du monde, pour reprendre la pensée de la féministe queer chicana Gloria E. Anzaldúa. Dans le cadre de ma présentation, je propose de porter un regard croisé entre les savoir-faire traditionnels et les nouveaux médias pour discuter les œuvres des artistes Martín Rodriguez, Rodrigo Velasco, Diego Briceño et ULO. Ces différentes pratiques mettent en évidence l’existence de systèmes de valeurs alternatifs, notamment portés par divers Peuples autochtones et réalités ethnoculturelles qui remettent en cause l’ordre mondial actuel.
PÉRIODE DE QUESTIONS
Remix et réseaux : des frontières défiées
Lignes imaginaires ou géographiques, discontinuités qui séparent ou qui unissent une souveraineté, les frontières ont le pouvoir de contenir, de délimiter un espace physique dont elle borne le périmètre à l’intérieur duquel s’exerce un pouvoir et s’affirme une identité. Qu’en est-il des univers immatériels, virtuels, réseautiques ? Ces univers sont-ils, par leur caractère immatériel, sans frontières ? Et, par-là, sont-ils un gage de liberté d’agir pour tous et toutes ? Comment s’y déploient les dynamiques de pouvoir ? Quels en sont les conséquences dans le monde sublunaire et inversement, comment le monde en dessine les frontières ? Ces questions rassemblent les œuvres du deuxième cycle de la programmation FRONTIÈRE de TOPO, réunies sous la thématique Remix et réseaux : des frontières défiées. Que ce soit par l’épuisement de la nature et de nos paysages (Oli Sorenson, Paysages de l’Anthropocène), par la déconnexion du corps propre face à l’imagerie médicale (Stéphanie Morissette, Méandres) ou par la falsification de l’archive numérique (SVEN, Plongeons) : les technologies ont des impacts irréversibles sur notre rapport au monde, au corps, et à l’histoire. Face à cette irréversibilité, les artistes proposent une invitation à renouveler le regard pour mieux révéler, s’approprier ou imaginer les mécanismes et les codes que recèlent ces technologies et pour en détourner les effets fragilisants.
PÉRIODE DE QUESTIONS
Pause
Projection des projets web (3e cycle)
Navigation des projets web
Géopolitique
Au moment d’écrire cette proposition sur la programmation de TOPO, tous les pays du monde, incluant le Canada, ferment leurs frontières afin de limiter la circulation et conséquemment, la propagation de Covid-19. La montée des mesures biosécuritaires pour maîtriser la situation aura sans doute des effets durables sur notre manière de concevoir les frontières, leurs fonctions et les rapports de force économique, politique, militaire ou sociale qui s’y jouent autant à l’échelle locale que globale. Depuis plusieurs années, les artistes contemporains témoignent des mutations frontalières ou encore révèlent des frontières invisibles en ayant recours à différentes modalités (immersion, automation, narration, etc.) pour exposer les enjeux identitaires, territoriaux ou culturels qu’ils soulèvent. Les artistes du 3e cycle d’expositions, Paolo Almario, Leila Zelli et Michel Huneault, portés par la thématique Géopolitique, conjuguent une réflexion esthétique et politique. J’examine ici la manière dont les artistes traitent de la frontière pour nous faire ressentir le présent et le devenir politico-affectif des corps qui y transitent et le pouvoir déshumanisant des espaces frontaliers par la machine autoritaire qui souvent s’y exerce. À travers différents processus médiatiques, les artistes éclairent et remettent en cause nombre de lieux communs.
PÉRIODE DE QUESTIONS
Conclusion
14h45 – 14h55
PÉRIODE DE DISCUSSIONS
15h15
Pause
15h30
Événement de clôture
Présidence: Jesse Aidyn, comité scientifique
Exposition filmique
Présentation et exposition du film « La Frontière » (2017)
Une réflexion sur notre rapport à la mer et son exploration, avec comme point de départ la mission scientifique qui s'est penchée sur les enjeux entourant le prospect Old Harry, dans le golfe du Saint-Laurent. Science, philosophie et politique s’entremêlent dans ce voyage atypique sous forme d'essai documentaire. (Source : ONF, 2017)
16h10
Période de questions
16h30
CLÔTURE DE L'ÉVÉNEMENT